Le 8 novembre 1943, Renaud Carpentier de Changy, citoyen belge de 23 ans qui en avait assez que son pays soit sous la coupe allemande, décida de rejoindre les forces alliées et commença un long périple semé d’embuches. Il rejoignit Paris, prit le train pour Toulouse mais fut arrêté par les Allemands. Après quelques semaines de prison, il parvint à s’échapper et à rejoindre son contact à Pau. Il passa en Espagne le 12 février 1944. Engagé ensuite comme volontaire au 1er Belgian SAS régiment, il participa à la libération de l’Europe.
« Le train s'arrêta, un coup de coude, nous y voilà : Lurbe-Saint-Christau. Par la route qui mène au bourg, de petits groupes de deux ou trois personnes montaient, lentement ; les natifs de l'endroit, petit à petit, s'éclipsèrent par d'invisibles sentiers vers leurs fermes dispersées à flanc de coteau. Bientôt, ne restaient seuls à marcher sur l'asphalte que les pensionnaires clandestins de l'hôtel. Ainsi, nous étions près d'une dizaine, venus par le même train, cheminant dans l’ombre, en silence, tous hérissés de méfiance. Quelques minutes plus tard, nous faisions connaissance autour d'une croustillante omelette au lard. Pêle-mêle, dans un coin de la salle du restaurant (réservée pour l'occasion), gisaient des sacs de montagne, des cannes et des pull-overs, tandis qu’autour de la table le vin de Jurançon faisait des tournées d'honneur. – « Oui, il faut prendre des forces pour ce voyage de nuit : 25 kilomètres ce soir - On ne monte guère mais c'est la partie la plus dangereuse : les patrouilles ! ». La confiance règnait grâce au vin : les patrouilles, on les tournera ! Nous étions là, neuf hommes et une femme, de tous âges, et de toutes nationalités, un juif allemand, deux officiers hollandais, un garçon de café parisien, un juif turc, un polonais, deux jeunes garçons de Pau, une jeune femme belge et moi-même. »
Renaud Carpentier de Changy, It’s a long way to go…, Inédit, archives Louis Loustau-Chartez